Ascension / Bölzer / Vassafor / Dysangelum
Sang & Os
(par Dökkalfar)
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"Under Four Wings of Death MMXV" European Tour
Moment : 23/02/15.
Lieu : Divan du Monde (Paris 18ème).
Moment : 23/02/15.
Lieu : Divan du Monde (Paris 18ème).
C’est
avec un mélange d’enthousiasme et d’appréhension que je me rends au Divan du Monde
en ce 23 février. Enthousiasme car j’y retrouve deux découvertes majeures
faîtes au Fall of Summer, à savoir Bölzer
et Ascension. Appréhension parce que
mon physique de crevette fan de stoner allait se retrouver au milieu de fans de
black metal (vous imaginez très bien l’apposition des deux). Mais le devoir et
la perspective d’une très bonne soirée ont pris le pas sur la crainte, avec au
menu de ce soir pas moins de quatre groupes : 3 jeunes loups germanophones
et un monstre néo-zélandais confirmé.
Une ouverture
précoce des portes fait que ce n’est pas la foule des grands jours devant
l’entrée de la salle, ce qui fait qu’il est très facile de se placer en bord de
scène et de faire ses réglages photo, réglages qui vont d’ailleurs être très
compliqués au vu des puissants spots rouges et la fumée (entre autres) causée
par la petite collection de bougies installée au centre du devant de la scène.
Avec ces bougies on retrouve un crâne de bouc posé sur un jeu de vieilles clés,
posé lui-même sur un livre ancien afin de créer et parfaire une ambiance
occulte. Et c’est face à une cinquantaine de personnes que les Allemands de Dysangelium se présentent.
Jeune
combo allemand, Dysangelium (à ne
pas confondre avec le groupe de death metal tchèque) en est tout de même à son
3ème chanteur avec qui ils auront enregistré leur 1er
album en 2014 qu’ils viennent présenter ce soir. On retrouve chez eux des
éléments esthétiques du black metal traditionnel avec warpaints et sang, mais
sans pour autant être « kitch » et ce grâce à leur chanteur Sektarist
0, totalement habité par son art, aux mains liées et ensanglantées, n’hésitant
pas à flirter avec la flamme des bougies. Car oui, même si musicalement c’est
assez classique voire basique comme bon nombre de groupes de black métal,
posséder un frontman charismatique et intéressant est un sacré avantage ;
cela permet à un non-fan du genre comme moi de vraiment prendre du plaisir,
autant dans la photo que dans l’écoute, malgré des basses un peu trop
puissantes qui occultaient (c’est le cas de le dire) d’autres sons (mais j’étais
peut-être placé trop devant). Et à travers les 6 titres présentés ce soir, j’ai
étonnamment pris du plaisir alors qu’en album ça m’aurait probablement vite
gavé… donc très belle entrée en matière en attendant d’accueillir l’ogre néo-zélandais
qu’est Vassafor.
Plutôt
inconnu et rare dans nos contrées, le duo néo-zélandais (et quintet en live)
existe tout de même depuis près de 20 ans, et même s’ils n’ont sorti qu’un
album officiel, "Obsidian
Codex" en
2012, ils ont réalisé toute une série
d’EP’s et de splits depuis 10ans. Comme je vous l’ai dit, il s’agit – comme Bölzer qui viendra après – d’un duo
composé de VK (Phil Kusabs) qui se charge des voix et guitares et de BP (Ben
Parker) à la batterie. En live VK est épaulé par un bassiste et un second
guitariste aux faux airs de Glenn Danzig.
Si je
devais donner la 1ère comparaison qui me vient à l’esprit après
quelques minutes du groupe je répondrais par ceci : c’est comme si Esoteric faisait du black metal. Et
j’ai très souvent pensé aux Anglais pendant toute la prestation de Vassafor.
Que
l’on soit clair, nous sommes face à une bête. Cette bête, semble totalement
indomptable et imprévisible pour qui ne la connait pas, à l’image de cette
batterie qui se veut tantôt hypnotisante, tantôt frénétique. Mais n’est pas la
seule à nous embarquer où elle le désire, car les autres instruments prennent
également un malin plaisir à nous embarquer où ils le souhaitent.
Malheureusement pour la proie que nous sommes, les rares moments d’accalmie ne
semblent là que pour mieux nous observer avant de nous traquer et nous dévorer,
crus de préférence. VK a beau avoir lâché pointes et chaînes pour ce soir (ne
gardant qu’un modeste crâne autour du
cou sous un gros pull dont la capuche laisse à peine percevoir ses yeux), ses
appels à la mort, à notre mort, ne sont pas moins intelligibles. Et à travers
les 6 incantations de ce soir, il prouvera que la bête a faim, et qu’elle
semble loin d’être repue. Puis sans un mot ni émotion, elle repartira, nous
laissant seuls avec ce qu’elle aura accepté de ne pas dévorer…
Set-list Vassafor:
1)Servitude
2) Rites of
Ascension
3)Obsidian King
4) Sunya
5) Craft of
Dissolution
6) Crowned in
Irradiated Ashes
Nous
voilà maintenant pour accueillir la 1ère tête d’affiche de la
soirée, à savoir Pet The Preacher… Bölzer, pardon (il fallait bien refaire
la blague, cf. report d’Audrey Horne/Pet
The Preacher/’77 Christian : http://www.psychopathia-melomania.com/2015/02/audrey-horne-77-pet-preacher-live-paris.html, le frontman danois, ressemblant à KzR, le Suisse),
alors que le Divan du Monde est étonnamment peu rempli, à croire que le petit
buzz fait autour du groupe (et la date du lundi) correspond peu à la réalité,
du moins à Paris, pourtant généralement pas le dernier des publics à soutenir
des groupes sur lesquels une petite hype s’est construite. Enfin passons.
Le duo
suisse germanophone avait fait très forte impression au Fall of Summer (cf. live report : http://www.psychopathia-melomania.com/2014/10/fall-of-summer-2014-live-torcy-vendredi.html),
déjà parce que c’était une découverte pour la plupart des spectateurs, et
également parce qu’il s’agit d’un duo guitare/batterie. Avec toujours seulement
2 EP’s à leur actif, la date parisienne est leur première depuis Torcy, et le
combo se montre toujours à la fois sombre et ultra élitiste. Elitiste parce que
toujours aussi difficilement descriptible, avec un pied dans le black metal, un
dans le death, mais également un (car Bölzer
a plusieurs pieds), dans toute la scène drone/experimental/doom. Le son de Bölzer est « tribalement
moderne », à l’image de l’ambivalence entre les tattoos de KzR et ce black metal presque bruitiste
que le groupe produit. Habité par son art avec mimiques fréquentes, une set-list
sur une feuille chiffonnée se baladera sur la scène pendant leur prestation, et
le frontman suisse en décontenancera ou anesthésiera plus d’un(e), qui aura
beaucoup de mal à entrer dans ce qui ressemble parfois à du post-black.
Malheureusement, le son manquait un peu de précision, ce qui desservira pas mal
le groupe et on verra souvent KzR s’égosiller sans rien entendre sortir de sa
bouche. Et force est d’admettre que les conditions étaient bien meilleures lors
de leur passage au Fall of Summer. C’est donc sur un sentiment mitigé que l’on
voit les deux Suisses quitter la scène, autant pour les fans et amateurs du
groupe, dont je fais partie, que pour ceux qui n’ont pas de tout su rentrer
dans l’univers des helvètes.
Egalement
découverts pour la plupart d’entre nous lors de la première édition du Fall of
Summer, l’ascension (c’est le cas de le dire), du quintet allemand (dont on
ignore toujours l’identité des membres) a été assez fulgurante, et ce autant
grâce à la qualité de leurs prestations dont la mise en scène est des plus
soignées, et par leurs deux excellents albums et autant d’EP’s.
Je dois
l’avouer, Ascension fait partie de
ces rares groupes de black metal (non progressifs à la Enslaved ou Ihsahn par
exemple) que je parviens à vraiment aimer, à l’image de Carach Angren par exemple. La question est de savoir pourquoi ce
genre de combos peuvent intéresser des non-férus du genre. La prestation de ce
soir va tenter d’apporter quelques réponses à cette étrange interrogation,
tandis que les musiciens entrent sur scène à travers la fumée, puis – à l’image
de Papa Emeritus et de ses Goules (Ghost)
– c’est leur frontman qui fait son apparition après une introduction. Ce
leader, habillé de la même façon qu’au Fall of Summer, haillons et poudre
blanche des pieds à la tête pour accentuer ce look fantomatique (j’aurai beau
essayer !), je ne parviendrai que très rarement à voir ses yeux à travers
mon objectif, mais je m’égare. En plus de ce look sobre mais recherché, on aura
une nouvelle fois la démonstration d’un chanteur totalement dans son trip, avec
une théâtralité/un théâtralisme (au choix) des plus intéressants. Revenons à la
musique.
Après
cette longue introduction, les hostilités débutent avec The Silence of Abel, et pour la première fois ce soir on entendra
des soli et des mélodies, et ça fera un bien fou d’entendre du black plus
mélodique, voir accrocheur à l’image du titre Deathless Light puis Fire and
Faith dont le chant fera penser à leurs cousins d’Hollenthon. Le set est intense et maîtrisé, où seul le leader est
mis en avant, agrippant fermement son micro composé d’os, et haranguant
régulièrement le public. Ici point de guitar hero (on est loin d’un Arve Isdal
d’Enslaved), même lors des soli le
lead-guitarist reste au fond de la scène, les yeux masqués par sa capuche.
Après
un bref interlude, nécessaire, on retrouve un morceau de black plus
traditionnel : Angel of the Burning
Sun issu de leur 1er album "Consolamentum" avant
de repartir sur le black mélodique de The
Dark Tomb Shines qui permet de constater une vraie différence entre les
deux albums et une évolution vers un black metal plus accessible, ce qui
déplaira sans doute aux puristes d’un black crade et sans concession aux
compositions courtes. Ici, les morceaux font en moyenne 7 minutes et
nécessitent plusieurs écoutes, comme peut l’être Death's Golden Temple ; puis cette pièce d’une dizaine de
minutes qu’est Mortui Mundi viendra
conclure le set des Germains, qui quitteront la scène de la même manière qu’ils
y sont venus. Le leader partira pendant les dernières minutes du morceau,
laissant ses musiciens se charger de faire retomber progressivement la
pression, puis repartir sans dire un mot…
Set-list
Ascension :
1) The silence of Abel
2) Deathless light
3) Fire & faith
4) Angel of the burning sun
5) The dark tomb shines
6) Death’s golden temple
7) With burning tongues
8) Mortui mundi
Comme je l’avais précisé en introduction, j’ai passé (à mon grand étonnement) une excellente soirée, avec des groupes à l’esthétique similaire mais aux différences musicales parfois majeures, montrant une partie assez large du spectre black metal, du très primaire au plus mélodique, voire parfois des éléments de post-black, mais en restant toujours underground et élitiste. Je ne sais pas si derrière cette proposition d’affiche l’idée était celle-ci, mais dans tous les cas c’est pleinement réussi, et même si ça fait surement partie du truc, on pourra regretter qu’aucun des quatre groupes ne se soit adressé au public (si on exclut la très courte intervention de Bölzer).
Alors
oui, les puristes risquent d’avoir détesté cette absence de black très traditionnel,
voire thrasho-punk (personne ne les oblige à venir !) : qu’ils
continuent à faire des concerts dans des caves, et laissent les autres savourer
des instants comme celui qu’ont proposé Garmonbozia
et Le Divan du Monde.
Mars 2015,
Rédigé
par Dökkalfar.
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