Gojira / Nostromo
Now I can see the whales
(par Inquisitor)
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"Magma" tour 2017
Moment : 31/01/17.
Lieu : Le Bikini (Toulouse).
Avant toute chose, j’aimerais remercier le
webzine et Warner Music pour m’avoir permis d’assister à cette date. Rater Gojira aurait été une immense
déception, car je ne les ai pas vus depuis juillet 2014 au festival Les Courants, à Amboise. Déjà, ça
remonte, et puis Gojira c’est quand
même une autre expérience en salle qu’en festival !
Arrivé au Bikini vers 20 heures. Premier
constat : l’endroit est bondé. Je n’avais jamais vu la salle aussi pleine, même
pas pour Behemoth il y a deux mois.
Signe que même si “Magma” – dernier
album en date des Landais – n’a pas fait l’unanimité, le public français est au
rendez-vous et curieux de découvrir les nouveaux morceaux sur scène.
Pour sa courte tournée française (7 dates seulement), Gojira a proposé à Nostromo
de les suivre. Formation inconnue pour ma part, il s’agit d’un groupe de
grindcore suisse ayant splitté en 2005. Et là, on s’interroge. Du grindcore.
Avec Gojira ? J’ai souvenir d’une
date à Blois où Nesseria n’avait pas
été reçu de la meilleure des façons. Les Toulousains sauront-ils apprécier la
musique des Helvètes, leur offriront-ils l’accueil qu’ils méritent ?
Le Bikini, plein à craquer, n’a pas fait le
coup de : « je viens pas pour la
première partie, ça m’intéresse pas », ce qui est déjà une bonne
surprise. L’autre bonne surprise, c’est la qualité de cette première partie.
Démarrant sur les chapeaux de roue, Nostromo
signe une véritable déclaration de guerre au public. La guitare est puissante,
tranchante, véloce. La basse est lourde, rapide elle aussi. Les fûts semblent
souffrir sous les assauts incessants du cogneur de la bande, tandis que Javier
au chant se donne à fond pour pousser sa voix bien typée hardcore.
Complète découverte pour moi, je remarque
rapidement que même si Nostromo
passe une bonne moitié du set à envoyer des riffs musclés soutenus par des
blasts robustes, la musique du groupe est très technique. Structures
alambiquées, ponts mélodiques et syncopes sont légion dans la set-list proposée
par les Suisses. On a même droit à quelques petites introductions sombres et
atmosphériques, vite rompues par une grosse cargaison de mandales dans la
tronche.
Durant les trente petites minutes du set de Nostromo, les spectateurs s’en sont
donnés à cœur joie. Le pit, chauffé au rouge dès la deuxième composition, avait
à peine le temps de refroidir entre les morceaux et était prompt aux pogos et
circle pits. Durant les quelques pauses syndicales offertes par le groupe, les
Toulousains n’ont pas hésité à s’époumoner et à exprimer leur avis concernant
ce qui se passait devant eux ; et le groupe, ravi, d’en rajouter une couche à
la composition suivante. Le concert s’est terminé sur deux reprises : Twist the Knife par les immenses Napalm Death, et Corrosion de Nasum. Aucune
surprise dans les choix dans morceaux tant les influences des deux formations
sont perceptibles chez Nostromo.
En bref : superbe prestation du quatuor, sans aucun temps mort. On retient
aussi leur attitude irréprochable, remerciant abondamment le public, Gojira et toute l’équipe du Bikini.
Merci messieurs pour cet amuse-bouche très goûtu bien qu’un peu inattendu. Place
au plat principal désormais.
Gojira et moi, c’est une
très belle histoire d’amour. Premier concert en 2008 au Printemps de Bourges, vus 8 fois depuis dans diverses salles et
festivals. Et toujours pas ce sentiment de lassitude. Gojira est certainement mon groupe favori depuis presque 10 ans
pour la qualité de leurs albums et l’énergie qu’ils possèdent sur scène. La
dernière sortie étant bien plus sage que les précédentes, on pouvait se
demander si Gojira n’avait pas envie
de raccrocher les gants, de calmer un peu les ardeurs du monstre présent en
chacun des membres. Il n’en est rien. Gojira
est toujours cette créature titanesque cracheuse de feu, semant le chaos sur
son passage.
“Since day one you try your
best
To get what you need the
most
The solution is you,
becoming a god”
Le Bikini tremble. Les quatre membres de Gojira entrent sur scène sous les cris
du public. Le fléau s’éveille, s’étire, toise la salle du regard comme pour la
mettre au défi. Les premières notes de Only
pain résonnent. Joe Duplantier s’approche du microphone et entonne le
couplet. Le son est excellent, le fond de la scène est animé par des
projections vidéo. Tout va bien. Je suis devant Gojira.
J’ai pris énormément de plaisir à retrouver
le groupe sur scène qui ne m’a paru nullement fatigué, ou blasé. Toujours cette
même envie de partager avec le public, de se donner à fond et de proposer plus
qu’un concert, mais bien un véritable voyage dans l’univers ésotérique et
éclectique du quatuor. La playlist de la tournée balayait la quasi-intégralité
de la discographie des Français, avec juste
“L’Enfant sauvage” mis de côté pour une obscure raison. Mais bien sûr,
tournée promotionnelle oblige, c’est bien “Magma”
qui était à l’honneur ce soir avec 6 des 10 morceaux de l’album. Le groupe n’a
évidemment pas joué mes favorites (les superbes Magma et Low lands) mais
force est de constater que ce sixième album a tout à fait sa place dans la
carrière des Landais, et ce encore plus en live. On ressent la force émotionnelle
de chaque morceau, et l’utilisation de pédales whammy et octaver apporte
une fraîcheur dans le set. Le chant clair n’est toutefois pas le point fort de
Joseph et cela a pu se ressentir sur certaines compositions, notamment Pray où le vocaliste semblait lutter
pour fournir un niveau sonore suffisant.
“So much told with no words
at all
Powerful presence for only
speech
Breath”
Le groupe a également fait plaisir aux fans
de leur troisième et meilleur album, “From
Mars to Sirius” qui reste selon moi le meilleur album de metal jamais
enregistré. Les inévitables Backbone
et The Heaviest Matters of the Universe
étaient de la partie, et bien sûr la géniale Flying Whales jouée (avec l’intro, s’il vous plait). Un véritable
régal pour les oreilles, mais aussi pour les yeux : la musique de Gojira était illustrée magnifiquement
par un show lumière orchestré à la perfection, sans oublier la vidéo qui
cependant n’était pas toujours indispensable. Mais qu’importe, tant l’exécution
des morceaux était irréprochable.
“He who learns must suffer
And even in our sleep
Pain that cannot forget
Falls drop by drop upon the
heart”
Retour au début des années 2000 avec la très
brutale Wisdom Comes, de l’album “The Link”. On se rappelle alors que
jadis, Gojira puisait ses riffs
Death metal auprès de Morbid Angel
et ça fait du bien de se prendre une bonne raclée made in France de temps en
temps. Le changement est d’autant plus radical que juste avant, on a eu droit à
Terra Incognita, morceau instrumental
sublime et d’une simplicité déconcertante. Pour quelques minutes, je suis au
paradis. Le groupe déroule la set-list et la fin du concert approche. Je dois
savourer ces dernières précieuses minutes avec cette formation que j’admire
tant.
“We pray, pray for the
light to reign
We call, we call the day
No faith in your world
Create my own to thrive”
Pray sera le dernier
morceau de “Magma” joué ce soir, avec
en prime une fin alternative digne du jam de Blow me Away you(niverse) sur “The
Link Alive”. On voyage encore un peu, on ferme les yeux pour se laisser
porter quelques minutes par les rythmes organiques de Gojira. Ici encore, les lumières feront la différence et
soutiendront à merveille l’immersion dans l’univers musical du quatuor. Trois
des membres finissent par quitter la scène, laissant seul Joe Duplantier qui
nous offre un petit solo de guitare très bluesy.
Assez peu de technique : on laisse ça à l’inévitable solo de batterie par
l’autre frère Duplantier. Pas de shred donc, mais un bon feeling blues/rock
progressif qui n’en fait pas des caisses. On n’est pas là pour ça. Le chanteur
quitte la scène et laisse le public hors d’haleine, encore plus assoiffé de
musique qu’il ne l’était avant le début du concert.
“Extended wings I'm flying
Over the valleys and planes
The curve of space I'm
leaving
Death is just an illusion”
Le rappel est assuré par deux morceaux
extraits de “The Way of All Flesh”,
les célébrissimes Oroborus et Vacuity. Le premier d’entre eux a
d’ailleurs vu ses dernières mesures revisitées pour permettre un superbe
enchaînement. Le Bikini sue, crie, vit ses derniers instants à fond avec ce
groupe qui a donné le meilleur de lui-même pendant près d’une heure trente.
Mais le show touche à sa fin. Vacuity
sonne le bout de la set-list malgré un public avide de guitares et de blasts.
Toujours adorables, les gars de Gojira ont partagé une bouteille de
champagne avec Nostromo sur scène et
ont passé dix bonnes minutes à remercier toutes les personnes qui ont eu
quelque chose à voir avec cette date, de près ou de loin. Des musiciens
d’exception, des hommes généreux et humbles. Nombre d’acteurs de la scène metal
actuelle devraient prendre exemple sur Gojira,
dans bien des domaines.
Dixième concert de Gojira pour
moi. Bien sûr je n’ai qu’une hâte : les revoir le plus tôt possible. Nul doute
qu’avec l’accueil qu’ils ont reçu, les quatre Landais reviendront faire un tour
dans le Midi. Et je serai là, bien sagement au rendez-vous. Car l’excellence
n’entraîne pas la moindre forme de lassitude.
Février 2017,
Rédigé par Inquisitor.
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