Agnes Obel / French for Rabbits
Murmures d’un piano…
(par Vlad Tepes)
|
"Aventine" tour (seconde partie)
Moment : 06/10/14.
Lieu : Le cirque Jules Verne (Amiens, 80).
Moment : 06/10/14.
Lieu : Le cirque Jules Verne (Amiens, 80).
Si
proche et pourtant totalement méconnu par moi, c’est avec plaisir que je conviai
ma Fée de Sang à aller découvrir le cirque Jules Verne, et ce pour une occasion
toute particulière. En effet, la mystérieuse Agnes Obel s’apprêtait à fouler à pas félins la belle scène amiénoise
pour nous conter les errances de son second album "Aventine", réalisé en 2013.
Je ne
savais pas trop à quoi m’attendre car cette artiste à l’art si charmant restait
malgré tout assez loin de moi en termes de connaissances musicales plus
pointues, et je ne demandais qu’à être surpris. Et quelle fut la
surprise ! Laissez-moi vous la raconter…
Avant
de nous laisser bercer par la talentueuse Agnes, ce fut aux Néo-Zélandais de French for Rabbits d’ouvrir le bal des
murmures…
Composé
de seulement trois membres, la formation nous aura gratifié d’une musique
majoritairement acoustique toute en nuances et délicatesse. Mené par une
chanteuse à l’allure extrêmement frêle, l’ambiance se trouvait aux antipodes de
l’excès, et la force de l’interprétation résida dans la retenue de la voix
aussi bien que des instruments.
Je ne
fus pas totalement conquis par cette prestation, car durant sa première partie
il me manqua ce petit quelque chose indéfinissable qui permet de réellement
s’immerger dans un univers. Toutefois, les derniers titres m’auront touché et
je commençai à trouver la porte d’entrée de leur univers. Malheureusement le
concert des French for Rabbits fut
bien trop court pour que je puisse poursuivre ma découverte.
J’imagine
assez bien réécouter leur musique bien au chaud chez moi, car cette musique est
une véritable ode à l’intimisme, et de ce fait il est presque étrange de
l’entendre dans une salle aussi grande que le cirque Jules Verne. Ainsi, nous
pouvons comprendre l’angoisse de la chanteuse en abordant cette seconde étape
de tournée. French for Rabbits reste
malgré tout à un groupe à découvrir !
Dans ce
cirque amiénois, l’ambiance commença à devenir étrange et mystérieuse, à mesure
que les fumigènes envahissaient l’espace. Improbable semblait ma présence
devant une artiste que je connaissais si peu, mais j’attendais ma surprise
patiemment…
Je dois
bien l’avouer, elle fut au rendez-vous ! Agnes Obel avait d’ailleurs prévenu son public dès le début de la
prestation : cette tournée se permettait de réinterpréter les morceaux
déjà bien connus par le public. En effet, nous y avons notamment redécouvert
les titres issus du premier effort de l’interprète – "Philharmonics" – tel que Riverside
par exemple. Reconnaissable dans sa mélodie globale, Agnes y apporta
d’importantes modifications concernant sa ligne vocale, choisissant de porter
l’accent sur un aspect frêle, comme pour offrir une nouvelle teinte à ce titre
connu de tous. Il semble qu’Agnes souhaitait démontrer que ces chansons
pouvaient encore apporter de nouveaux éclairages, de nouvelles émotions à
l’auditeur. Pari pleinement réussi !
Vous
l’aurez compris, Agnes n’a pas souhaité ce soir-là ronronner, même dans les
sphères les plus connues de son répertoire. Concernant les titres du second
effort "Aventine", mon
ressenti s’est avéré fort complexe, à l’image d’une musique qui ne l’est pas
moins. En effet, son caractère épuré pourrait faire penser que celle-ci soit
simpliste, alors qu’apportant des affects très contrastés. Voici ici son titre
éponyme :
En
termes d’émotions, la douceur est peut-être celle que j’ai ressentie de manière
plus manifeste, même si je pense qu’elle se confronta assez rapidement à bien
d’autres émotions. En effet, une fine obscurité a semblé parcourir
l’intégralité du set, semblant fusionner avec la douceur pré-citée. Malgré
tout, n’oublions pas la mélancolie qui apparait comme constitutionnelle à la
musique d’Agnes Obel, comme le
superbe Dorian (issu du second
opus) :
Agnes a
montré d’elle et de sa musique un caractère insaisissable, difficile à
circonscrire. Peut-être certains d’entre vous trouveront cela saugrenu, mais je
ne peux m’empêcher de faire un parallèle avec Fiona Apple, qui pourtant présente un univers bien différent de
celui qui nous intéresse ici. Toutefois, le parallèle me semble pertinent au
niveau du caractère pluriel développé par les deux artistes sur scène. En
effet, toutes deux flirtent avec des univers à priori incompatibles. Alors que
Fiona Apple trace une ligne directe entre douceur et agressivité, Agnes Obel a tenté et réussi à établir
une continuité entre douceur et noirceur. Bien entendu, cela échappera à
l’auditeur distrait…
En
parallèle notre chère Agnes nous aura également fait part d’interprétations
superbes en termes de reprises, donnant une toute nouvelle dimension à des
titres écrits par d’autres. Sans trop de surprises, Close Watch – du multi-instrumentiste gallois John Cale – fut joué et nous vous permettons de le revivre
ici :
Nous
avons également eu le droit à Between the
Bars, du défunt Américain Elliott
Smith, au climat très différent :
D’une
grande sobriété, Agnes a su poser sa voix avec deux pianos différents, entourée
de deux violoncellistes et d’une violoniste. Toutefois, ces dernières ont su
rester à leur juste place et mettre en avant la fragile voix d’Agnes.
Techniquement assez simple, elle n’en fut pas moins emplie de moult détails. En
effet, elle aura su jouer sur la texture, montrant par-là que la simplicité
peut être fort complexe.
D’ailleurs,
la musique d’Agnes Obel ne
pourrait-elle pas être caractérisée par cette phrase mienne : L’apparente
simplicité d’une complexité profonde…
Set-list Agnes
Obel :
1) Louretta
2) Pass them by
3) Beast
4) Fuel to fire
5) On powdered
ground
6) Aventine
7) Dorian
8) Run cried the
crawling
9) (untitled)
10) Brother
sparrow
11) Riverside
12) Words are
dead
13) The curse
14) Between the
bars (Elliott Smith cover)
15) Close watch
(John Cale cover)
16) Smoke & mirrors
Comme
vous l’aurez deviné, cette soirée fut riche et belle; et ma Fée de Sang
et moi-même furent conquis (même si relativement à des émotions différentes).
Agnes Obel –
malgré sa modeste discographie – reste une artiste passionnante qui n’a pas
fini de nous surprendre…
Octobre 2014 à février 2015,
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire